Art
2014
Théo Ouaki
On parle de palimpseste pour un objet qui se construit par destructions et reconstructions successives, tout en gardant la trace des différents passages. Ma peinture tient en cela du palimpseste. Elle se définit dans une constante réécriture et se construit par le recouvrement, l’empilement et l’accident. Elle produit un travail qui puise son inspiration à la fois de l’Art Brut et du Graffiti.
Les grands formats autorisent un geste proche de celui de « faire le mur ». L’écriture se transforme en dessin. Cette peinture est une bande-dessinée sans case où l’on croise des formes anthropomorphes : des chimères à mi-chemin entre l’homme et l’animal, un bestiaire des bas-fonds.
Mon travail explore un panorama de techniques picturales : la sérigraphie, le dessin et la peinture. Cette forme de peinture est une manière paradoxale, elle est pleine de contradictions.
Elle offre une opposition entre ce que l’on voit et ce qui est caché. Il en découle une peinture mobile qui évolue avec le regard à mesure d’explorations visuelles. On passe de l’infiniment grand à l’infiniment petit. C’est une peinture dense, pleine, où tout est question d’équilibre entre saturation et respiration. De la peinture massive se révèle un dessin où se tissent les images. Il se produit également une confrontation entre les médiums. Cela va de la toile brute ou apprêtée aux outils utilisés. Les médiums « bâtards », issus de la rue, entrent en conflit avec les outils « nobles » conçus pour l’Art, pour faire œuvre d’images. Une guerre sociale s’opère sur la surface du tableau.
Á travers ce chaos et cette violence se réalise une tentative de mettre de l’ordre dans le désordre, un désordre qui s’empile comme un palimpseste du savoir. Les toiles agissent comme de grandes palettes de peintre, non pas faites de couleurs mais de fragments d’histoires et d’influences.
Chaque tableau représente un manifeste pour la générosité picturale, dont l’inspiration vient essentiellement de la vie ordinaire du monde, des voyages et de l’observation des gens qui l’habitent, un ensemble de choses de l’ordre des mimiques du quotidien.
(Texte extrait du catalogue des diplômés de 2014)