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Diplômés

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« Il faut exagérer, encore, puis laisser réduire. »

La simplification opérée depuis la peinture moderne a conduit à l’extinction des problématiques les plus intéressantes de la peinture. La peinture n’aura jamais été si putassière que depuis qu’elle s’est libérée des contraintes de représentations traditionnelles. Elle est réduite à une surface, à une matérialité facile qui ne recouvre que son indigence à s’émanciper des modes et des tarifs. Ce qui nuit à l‘appréhension de la peinture contemporaine, c’est ce qui a nui à l‘art de tout temps : le « formalisme mimétique » dans lequel s’abîme toute singularité. Cependant, nous le savons : la réalité dont il faut partir est l’insatisfaction. Nous ne pourrons détruire la mémoire de l’art, nous échouerons certainement à ruiner les conventions de sa communication et à démoraliser ses amateurs mais nous constituerons petit à petit un sérail de gestes prêts à détruire, à ruiner à démoraliser… à révéler l’ordre du monde si beau, ce tas d’ordures répandues au hasard.

En regardant les Maîtres, inutile de chercher une quelconque vraisemblance, un appui à la balustrade du monde visible : ces compositions, ces gestes et ces formes, ces couleurs et ces perspectives ne miment pas le monde, mais en donnent l’accès dans l‘écart même de la représentation. Il s’agit d’agencer, de déplacer chaque chose de quelques millimètres, de composer avec les décombres polysémiques qui nous entourent, faire advenir la parodie nécessaire à l’intrigue. Il y a un dédoublement qui s’opère en chaque oeuvre forte. Le dédoublement est avant tout le travail de la littérature. J’englobe ici les mythes et les religions. Il y a cette idée selon laquelle l’Absolu / le Paradis est identique à notre monde.

Selon un rabbin, pour comprendre à quoi ressemblerait le Paradis, « ll suffirait de déplacer « à peine » toute chose du monde ». Mais la mesure de cet écart est très difficile à trouver, l’homme a pour cela besoin d’une médiance. Cet infime déplacement ne concerne pas l‘état des choses mais sa signification et ses limites. De fait, il n’a pas lieu dans les choses mais à leur périphérie, dans le jeu entre chaque chose et elle-même. Peindre, parfois, c’est agir dans le sens de ce glissement.

(Texte extrait du catalogue des diplômés de 2010)