Art
2012
Mathilde Magnée
Canopée
Au dessus de la ville, depuis les fenêtres, balcons, terrasses, on regarde avec hauteur la rue et ses mouvements. C’est un point de vue privilégié, propice à la rêverie.
Mathilde Magnée nous propose cette position d’observateur hors du temps. Les photographies de la série Canopée sont prises de nuit et jouent de l’atmosphère et des fantasmes qu’elles véhiculent. Séduction de l’image qui joue son propre jeu, appel à la contemplation. C’est de spectacle dont il est question. L’artiste place le spectateur dans un univers trouble. Reliés à la ville par les taches floues de ses lumières lointaines, les personnages, sous les feux des projecteurs, nous sautent au visage. Le regard perdu hors du cadre de la photo, ils semblent être dans un entre-deux, qui glisse de la fête à la cérémonie.
Tableaux lunaires, Pierrots qui rient qui pleurent, la nuit accueille les perditions. C’est le temps des méprises. Le plus petit détail devient le clou de la soirée. Une branche devient une main, un drapé prend les formes d’un animal inconnu, une guirlande de pacotille habille le tronc d’un arbre.
La canopée est la partie la plus haute des forêts, celle qui voit la lumière. Le titre superpose ainsi l’urbain et sa réalité à l’ambiance sombre et touffue de la forêt. Que se passe t-il au delà des arbres, au-dessus de la ville ? Le yucca, comme un point de contradiction à la ville en contrebas, ponctue la série. Il marque l’avènement d’une autre logique, d’une sorte de divagation de l’ailleurs, qui résonne dans le son de canopée.
Maquillage et nature cohabitent de manière presque trop naturelle pour ne pas montrer du doigt l’artifice ; la mise en scène est trop évidente pour ne pas insinuer le dérapage. Canopée est un espace de tension entre ciel et terre, entre le contour et le flou. Au dessus de la ville se passent les histoires en apesanteur.
Adèle de Keyser
(Texte extrait du catalogue des diplômés de 2012)