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Diplômés

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“150 x 70 x 150 cm
  • Art

  • 2009

Bérangère Crouillère

Une organisation s’est établie. Bois de manguier, plastique, pigment doré. Récupérés et bon marché. Le bois est le cadre fondateur, ossature pourtant vacillante. Ecorché, patiné, modulé. Des tasseaux minces, fragments en exil d’un arbre dont on ne retient ordinairement que les fruits. La structure est « pragmatique » : portique, présentoir, étalage. La première image est l’emprunt familier d’une idée de mobilier. Des gangues plastiques sont pendues au châssis les unes à la suite des autres. Cocons d’insectes industriels, cosses de fruits artificiels, manteaux informes. Le réalisme immédiat du portique de galerie de prêt à porter est désactivé. Le pigment volatile est happé par les dispositions électrostatiques des poches. Vibration de la couleur. La légèreté du matériau offre à l’oeil une impression de bronze souple. Un séchoir pour les peaux du Ciel en fond d’or. Une coupure symbolique avec le réel. Une sensation de vestiges des choses et des corps. Le portement du luxe peut-être. Para-chutes suspendus. La métaphore d’un autre genre fabriqué. Le scénario concret qui rassemble les traces des choses oubliées et des formes suspendues comme les dépouilles d’une étrange marchandise…

C’est à partir d’éléments du « réel » rapportés puis réappropriés que j’ai décidé de travailler. Du quotidien et de la consommation soustraits pour mieux s’en détacher. Ce sont des enregistrements vidéos, des rendus photographiques, des observations architecturales, des objets fonctionnels et des matériaux hétérogènes. Je les dé-construis, les découpe, les amalgame, les combine. Je les mets en pièces, constituant de nouveaux ensembles. La récupération est un processus historique, intime et social. Au-delà de son aspect économique, c’est une façon de nourrir ma subjectivité avec du réel, soutenir un dialogue et des échanges avec notre monde fragmenté actuel. L’assemblage se révèle comme un acte esthétique à une échelle humaine et contemporaine, une définition expérimentale de la présence de corps perdus. Je les choisis pour leurs qualités plastiques, leurs potentiels-images et leurs caractères littéraux. Ils sont en général réflecteur de lumières-métal, verre, plastique. Écrans de réflexion et surfaces de traversée du regard se croisent, un effet où le spectateur est un oeil et un mouvement pour dé-figer la sculpture. Des liens et des interactions se créent pour « modeler » une forme hybride. Le collage de leurs différentes natures permet de brouiller les usages dans la vision et les indices temporels qu’ils offrent. La forme ouverte d’une sculpture multiple. Le processus alchimique des corps à traduire tisse entre eux un rébus sans commencement ni fin, redonnant une intensité aux échanges.

(Texte extrait du catalogue des diplômés de 2009)